Avant toute chose, pour me comprendre (comme dirait
Véronique) et pour comprendre ce qui va suivre, permettez-moi de vous replanter
le décor. Tel que vous me lisez, ayant vécu mon adolescence dans les années
1990, je suis, comme beaucoup de gens de ma génération, un fan absolu de la
saga Scream au cinéma, du premier
("j’l’ai vu plus de vingt fois, je sais bien de quoi j’parle") au
quatrième. Je fais même partie de ceux qui ont adoré le 2 et le 3, souvent
injustement décriés. Pour moi, Scream
est la quadrilogie phare du slasher movie, ce sous-genre très particulier et
très codifié du cinéma d’horreur. Alors quand MTV a annoncé vouloir décliner la
franchise en format série, j’étais sur la tête. Passé la première minute où
j’ai d’abord pensé "sacrilège", j’ai trépigné pendant de longs mois
pour voir ce que cette adaptation allait donner. Et si l’article de Jean-Maxime Renault sur SeasonZeroCom consacré à l’analyse du script de l’épisode pilote m’avait
déjà bien rassuré, les premiers épisodes de la série ont fini de me soulager. Passage
en revue d’une recette parfaitement cuisinée.
Loin d’être une parodie (comme l’était Scary Movie), la saga Scream
avait au contraire pris le parti de respecter à la lettre les codes du genre
pour pouvoir s’en amuser et les détourner habilement, à coup de clins d’œil et
de références bien placées. Et c’est ce qui faisait tout l’essence et le charme
de cette saga : ne pas prendre les spectateurs pour des imbéciles tout en
leur servant exactement ce qu’ils étaient venus voir. Du grand Kevin Williamson
(qui avait, by the way, fait exactement la même chose avec Dawson’s Creek et les séries de teenagers). Le moins qu’on puisse
dire, c’est que la série Scream (que
j’appellerai ScreamMTV pour la dissocier
des films) suit exactement les mêmes pas que sa grande sœur cinématographique.
D’abord, parce que tous les ingrédients du slasher movie de
base sont réunis : la petite ville tranquille de Woodsboro est devenue
Lakewood, Sydney, l’héroïne naïve et candide harcelée par le tueur, s’appelle à
présent Emma et la bande de lycéens trentenaires tous plus beaux les uns que
les autres a remplacé les acteurs cinquantenaires des films. On retrouve aussi les
énormes fêtes dans de magnifiques villas américaines avec des gobelets rouges
et de la soupe pop-rock, les cours de littérature qui ressemblent à des
discussions entre potes et les caricatures indispensables du lycée ricain (la bi-atch,
le geek, le sportif, la jolie première de classe…). ScreamMTV rajoute même une pincée de Souviens-toi l’été dernier avec d’anciens évènements dramatiques
qui reviennent hanter les héros et un soupçon de Vendredi 13 avec un nouveau Jason, esprit vengeur sorti tout droit
d’outre-tombe.
A ces éléments clichés communs à tout bon film d’horreur, la
série incorpore certains ingrédients plus spécifiques à la saga Scream: un masque blanc pour le tueur - ça
n’est pas celui des films, devenu totalement iconique, mais celui-ci fonctionne
très bien aussi ; une longue scène d’intro autour de la première victime, efficace
mais certes pas aussi mythique que celle de Drew Barrymore ; les
remplaçants de Dewey et Gale, respectivement le flic et la journaliste
incontournables des films ; et des références à la pelle à la pop-culture,
de Game of Thrones à Terminator Genisys en passant par Hannibal et Elephant Man.
Et puis il y a surtout Noah. Noah, c’est le nouveau Randy,
le geek fan absolu de films d’horreur qui en connait parfaitement les codes et
le fonctionnement. Grace à lui, les scénaristes désamorcent les critiques que l’on
serait tenté de faire à la série, et ils le font de façon aussi jouissive et
drôle que dans les films. Dans Scream 2,
Randy et ses amis débattaient sur le fait que les suites étaient toujours
ratées. Ici, Noah explique clairement dès le pilote en quoi un slasher ne peut être
décliné en série télé. C’est ce second degré qui permet à ScreamMTV de devenir un vrai petit délice pour n’importe quel
amateur du genre.
Enfin, aux éléments typiques des slasher movies et ceux,
propres à la saga Scream, il ne faut
pas oublier de mentionner un nouvel aspect non négligeable, spécifique à la
série. ScreamMTV se passe en 2015
autour de personnages adolescents maniant Facebook, Twitter et Snapchatt mieux
que quiconque. Les héros s’expriment en hashtags, communiquent par SMS et reçoivent
directement des GIFs du tueur. Bien plus calés que leurs ainés
cinématographiques, ils ne semblent nullement impressionnés par les facultés du
tueur à masquer sa voix au téléphone, à pirater un téléphone portable ou à
filmer ses victimes dans leurs derniers moments. Pour eux (comme pour le
spectateur qui aurait vu Scream 4), c’est
du déjà-vu. Même pas peur. Et ce qui pourrait les rendre agaçants les rend
finalement plus forts. Ces ados-là ne sont pas facilement intimidables.
Au final, avec sa recette parfaitement préparée, ScreamMTV remplit sa mission à
merveille. Légère, pop, colorée, la série est un vrai bonbon, qui se regarde
avec un plaisir régressif mais bien réel. Pour le spectateur que je suis, ayant
grandi, adolescent, avec Scream, Halloween et autres Massacres à la tronçonneuse, elle est LE guilty pleasure de l’année.
Les romances ne sont pas toujours crédibles, l’âge des héros non plus, mais qu’importe,
c’est fun. C’est même sans doute assumé tellement ça parait hénaurme. Les
scènes dites d’horreur, ne sont pas effrayantes pour un sou, mais elles sont pleines
de bonnes idées et d’astuces inédites pour nous divertir. De plus, comme pour
mieux jouer avec le spectateur, les producteurs de la série ont annoncé haut et
fort qu’il y aurait une victime par épisode. Les fausses pistes et les
agressions qui n’en sont pas se multiplient avec malice pour entretenir le mystère
du "Who’s next" annoncé par Noah. Et je suis obligé de constater que
ça marche et que je suis devenu accro. ScreamMTV
m’a tuer.
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