dimanche 31 mai 2015

Le club des poissards


On arrive déjà bientôt à la fin de la saison 5 de Game of Thrones. Je ne sais évidemment pas encore ce que nous réserve les derniers épisodes de cette saison mais une chose est sure : sans spoiler, le cru 2015 était une mauvaise année pour Sansa Stark. Cela dit, il faut reconnaitre qu’en dehors du pilote où la jeune fille était encore toute pimpante et toute souriante, on ne peut pas dire qu’elle ait connu beaucoup de jours heureux. Cela m’a amené à réfléchir à ces personnages de série contre qui le sort s’acharne encore et toujours. Ceux qui n’ont pas droit à une seconde de répit. Ceux qui ont franchement la scoumoune. Voilà donc la liste des 4 plus grands poissards de la série télévisée :


Une bonne poilade de plus pour Bree...
Bree Van de Kamp – Desperate Housewives : heureusement que la série a duré huit ans. Ca a laissé le temps à Bree de reprendre pied après le calvaire qu’elle a traversé pendant les premières saisons. Je crois bien que Bree n’a pas reçu une seule bonne nouvelle en deux ou trois ans. Son attitude parfaite, son brushing impeccable, son sourire figé faisaient sa force : en apparence, Bree ne se laissait jamais atteindre par quoi que ce soit. Résultat : les scénaristes se sont lâchés et lui ont tout fait. Absolument tout. Jusqu’à ce qu’elle craque. Un mari infidèle et cardiaque, une fille plus teigne que Nelly Olson, un fils qui, sous couvert de faire son coming-out, lui fait subir les pires horreurs possibles (y compris celle de se taper le petit copain du moment de sa mère), un amant qui se révèle être le meurtrier de son mari… Pas étonnant que Bree se réfugie dans le Chardonnay et en devienne accro.
Il faudra attendre le courant de la saison 3 pour voir la plus républicaine des Housewives reprendre pied. Mark Cherry, créateur de la série, disait de Bree qu'elle était celle qui ressemblait le plus à sa propre mère : à la place de cette dernière, je me poserais des questions sur cet acharnement à trainer ce personnage plus bas que terre...


Un samedi soir typique dans la vie de Kim
Kim Bauer – 24 : Kim pourrait facilement avoir sa place dans un autre classement : celui des plus grosses têtes à claques de l’histoire des séries télé. Insupportable boulet, Kim est à priori une emmerdeuse qui prend systématiquement les mauvaises décisions. Mais pour être tout à fait sincère, il faut bien avouer que la chance ne fait pas vraiment partie de ses atouts principaux. Kim accumule les ennuis comme aucun autre personnage de la série. Elle se fait enlever toutes les trois minutes, elle perd sa meilleure pote au bout de quelques heures et sa mère à la fin de la journée. La seconde saison est encore pire : le papa de la gamine qu’elle garde est un furieux psychopathe qui cherche à la buter, elle se prend le pied dans un piège à loup pendant une balade en forêt (non mais sérieux ? à qui ça arrive de nos jours ??) et lorsque qu’elle trouve refuge dans un abri antiatomique (après avoir dû faire ses adieux à son père), elle tombe là encore sur un serial killer en puissance. Les autres saisons ne seront pas plus agréables pour elle : grosso modo, chaque fois que Kim fout les pieds au CTU, c’est systématiquement le bordel dans la demie-heure qui suit. Kim Bauer, celle qu’il ne faut pas inviter.


Sansa, au comble de l'épanouissement.
Sansa Stark – Game of Thrones (pas de spoil sur la saison en cours): je le disais en début d’article, Sansa les attire comme les mouches sur… enfin bref. Certes, la vie à Westeros n’est rose pour personne et tous les personnages ont subi des revers de fortune un jour ou l’autre. Mais Sansa les accumule. Naïve, presqu’idiote au début de la série, la jeune femme va vite apprendre qu’elle ne vit pas au pays des Bisounours. Un temps intéressée pour le prince Joffrey, elle déchante rapidement devant celui qui va lui faire subir les pires tortures psychologiques (ah ce moment romantique où Joffrey présente à Sansa la tête de feu son père plantée au bout d’un pic..). Et très vite, Sansa va se retrouver seule. Mais genre vraiment seule : perdant la moitié de sa famille, elle ne trouve pas un seul soutien à King’s Landing, si ce n’est le très ambigu Lord Baelish, qui, pour la libérer de son calvaire, ne trouve rien de mieux que de la rendre coupable de la mort du roi aux yeux de Cercei. Sympa le cadeau. Je ne spoilerai pas la saison 5 mais disons juste que les déboires de Sansa jusque-là n’étaient qu’une entrée en matière. Abattue, isolée, détruite, Sansa n’a encore rien vu et pourrait même regretter son cher Joffrey… Bref, on attend encore et toujours le moment que le vent tourne enfin pour la jeune fille.

Jesse, hilare.
Jesse Pinkman – Breaking Bad : seul représentant de la gente masculine dans cette liste de poissards invétérés, Jesse est peut-être l’ultime champion dans cette catégorie. Globalement et pour faire court, la trajectoire de Jesse au cours des 5 saisons de Breaking Bad n’est qu’une longue et douloureuse chute vers les enfers. Et encore, il faut avoir conscience que le garçon ne part de très haut : addict, rejeté des siens, quasi-stupide, Jesse n’est pas le plus verni des hommes quand il croise Walter White. Mais ça n’est rien par rapport à ce qu’il va traverser pendant ses années aux côtés de son ancien prof de chimie. Sans arrêt manipulé par celui qu’il finit par considérer, à tort, comme son mentor, Jesse prend un nombre incalculable de poings dans la gueule à la place de son associé. Il est même contraint à devenir un meurtrier pour le compte de celui-ci. Pourtant, il a bien essayé de s’éloigner de tout ça. Mais à chaque fois que M. White revient sonner à sa porte, Jesse tombe toujours plus bas, jusqu’à atteindre le fond des chiottes. Littéralement. Tout un symbole. Et que dire de ses relations amoureuses ? Parce que oui, Jesse est un cœur tendre au fond. Mais on ne peut pas dire que ça lui réussisse. Et encore moins à ses compagnes. Pauvre Jesse, le plus malchanceux des sons of a bitch.

Bonus : Sarah Crewe – Princesse Sarah : un mot sur celle qui a traumatisé toute une génération de jeunes téléspectateurs. Sarah, c’est la cosette de la série télé. Cette richissime enfant gâtée se retrouve orpheline du jour au lendemain, plus fauchée que les blés. Du rang de chouchoute de la maitresse, elle passe à celui de bonne à tout faire méprisée par tout le monde. Véritable bouc émissaire de la société tout entière, Sarah subit quotidiennement les humiliations de Mme Mangin, de Lavinia et des Thénardiers locaux, et ce, sans jamais se plaindre. A côté, Cendrillon est une privilégiée. Mais bon, à la différence des précédents candidats ici présentés, on savait que ça ne durerait pas pour elle puisque le spectateur apprenait très vite qu’en fait, Sarah était toujours aussi blindée de thunes que lorsque son père était vivant.
 
"Tu seras capable, le sourire aimable, d'oublier le mal, ma petite chérie"



Le propre d’un personnage de fiction, c’est de traverser des épreuves dont il ressort changé. Mais parfois, ces épreuves sont longues et tortueuses et ce changement n’est pas des plus positifs. Oui, parfois, certains ont un karma bien pourri. Et les scénaristes s’en donnent alors à cœur joie. J’espère sincèrement que Sansa Stark (la seule issue d’une série encore en cours) connaitra un jour une vie plus heureuse que ses débuts. Entre nous, c’est pour le moment mal barré.

vendredi 8 mai 2015

Des Grandes Grandes Vacances de grande grande qualité




Aujourd’hui, 8 mai 2015, 70 ans après l’armistice de 1945, petite note de circonstance.
Il m’arrive rarement de binge-watcher une série (comprenez avaler une saison en un temps record), et encore moins un dessin animé. Mais là, je dois dire que je n’ai pas résisté devant la petite perle diffusée ces dernières semaines sur France 3 (et toujours accessible en replay) : les Grandes Grandes Vacances. L’air de rien, cette série feuilletonnante (fait rarissime pour un dessin animé) de 10 épisodes de 26 minutes, conçue par Delphine Maury et Olivier Vinuesa et réalisée par Paul Leluc, vient de mettre un sacré coup de pied dans la fourmilière de l’animation en France en allant à l’encontre de tout ce qui se fait habituellement pour la jeunesse à la télévision et en se payant même le luxe d’être un carton absolu (1,3 million de téléspectateurs pendant ces deux semaines de diffusion). Un must-see pour toutes les générations.


Les Grandes Grandes Vacances racontent le quotidien d’Ernest, 11 ans et de sa sœur Colette, 6 ans pendant leurs grandes vacances de l’été 1939. Envoyés chez leurs grands-parents pour n’y passer à la base que quelques semaines, ces deux jeunes Parisiens vont finalement vivre les six années d’occupation allemande à la campagne, en Haute-Normandie, qu’on jugeait à l’époque moins dangereuse que la capitale. Sans mièvrerie ni angélisme (ce que pourrait, à tort, laisser croire la bande-annonce un peu trop gentillette), la série nous propose ainsi de revisiter la Seconde Guerre Mondiale à travers les yeux d’enfants de l’époque. Une sorte de Village Français de l’animation. 


Certes, il s’agit d’un dessin animé diffusé le matin pour un jeune public mais aucun sujet n’est évité, loin de là. Abordant frontalement les diverses problématiques de l’époque, les scénaristes Delphine Maury, Guillaume Mautalent et Sébastien Oursel osent parler de tout, y compris de thèmes qu’on pensait impossibles à aborder en case jeunesse. Le rationnement, le marché noir, la déportation des juifs, la collaboration, la résistance, la mort de proches (on ne rigole pas toujours dans cette série…) : tout est traité, et avec intelligence, de surcroit. Je suis assez sidéré de voir jusqu’où sont allés les auteurs pour parler de la guerre et des situations dramatiques qui en découlent. Il est d’ailleurs possible qu’un certain nombre d’enfants ne comprennent pas tout ce qui se dit dans cette série réaliste mais qu’importe : les auteurs font le pari ô combien réussi de ne pas prendre le jeune public pour des demeurés et réussissent à mêler de façon très naturelle la petite histoire d’Ernest et Colette à la grande Histoire sans trahir la réalité chronologique de cette dernière.

Il faut dire que tous les personnages principaux et secondaires de cette série sont particulièrement réussis et contribuent tous à la réussite de cette fresque historique. Dans la bande d’enfants d’abord, en plus du très touchant Ernest et de l’amusante Colette, on rencontre des profils aussi variés qu’attachants : Muguette, la campagnarde un peu sauvage mais vraiment courageuse, Jean, le fils du maire, trop bien élevé mais toujours loyal et Fernand, un gamin qui peine à trouver sa place dans le chaos de 39-45 car alsacien et juif. On trouve aussi les géniaux Marcelin et Gaston Morteau, deux jeunes fermiers qui ont d’abord du mal à accueillir les deux ‘Parigots, têtes de veau’.
Aussi nombreux soient-ils, chacun d’entre eux a des scènes à défendre et tous se révèlent extraordinairement touchants au fil des épisodes. Je pense notamment à l’histoire d’amour naissante, toute jolie, toute sobre entre deux des protagonistes. Ou à la magnifique relation d’amitié entre le petit Gaston et un pilote anglais le temps d’un épisode : une grande grande réussite de la série qui m’a arraché une larme (et ça n’était pas la seule).
Les adultes ne sont pas en reste dans cette série et permettent d’apporter mille nuances à cette période pour le moins trouble de l’histoire. Collaborateur ou résistant, allié ou occupant, lâche ou courageux, la palette est large et les protagonistes sont parfois loin du manichéisme habituel, à l’image de ce personnage féminin qui tombe malgré elle sous le charme d’un soldat allemand. Complexe et bien amené.

Coté graphisme, la série aussi est une réussite ; on n’en attendait pas moins des Armateurs, la société de production à l’origine entre autres de Kirikou et Ernest et Célestine. Peut-être un brin classiques, les designs sensibles d’Emile Bravo collent pourtant parfaitement à l’époque représentée et offrent un ensemble très cohérent entre ce qui est raconté et ce qu’on voit à l’écran. Bourrées de détails réalistes, chaque scène est un plaisir pour les yeux en même temps qu’elle nous apprend mille choses sur l’époque. Tout est pensé pour coller le plus à la réalité historique, jusque dans la longueur des vêtements d’Ernest qui passe des culottes courtes de petit garçon au début de l’histoire aux pantalons de jeune adulte qu’il est à la fin de la série.
 Notons qu’une fois de plus, cette série démontre qu’avec des techniques d’animation en 3D, il est possible d’obtenir un rendu 2D fluide, proche de l’animation traditionnelle. Jolie performance.

Enfin, un mot également sur la remarquable bande-son de la série : les comédiens-doubleurs sont parfaits et la série joue encore une fois très habilement avec les accents des uns et des autres. Autre indice qui prouve l’intelligence de la série : les Allemands parlent allemand, les Anglais parlent anglais et les petit Français ne comprennent rien à tout ça.
La musique, composée par Syd Matters, surtout connu pour cette chanson entre autres, est absolument superbe. Je regrette seulement que le générique ne soit pas plus long : j’aimerais pouvoir profiter un peu plus de cette jolie mélodie. Mais du coup, je me rabats sur le reste du répertoire de l’artiste depuis 48h.



France Télévisions nous avait déjà apporté le très réussi Village Français ; à présent les enfants ont eux aussi leur petit chef d’œuvre télévisuel sur cette période de l’Occupation à découvrir au plus vite en replay (et gratuitement pendant tout le mois de mai) à l’occasion de ce 70ème anniversaire de la fin de la guerre  et à revoir dès le 3 juin lors de la sortie DVD.