lundi 30 novembre 2015

Grace and Frankie: 70 is the new 30

Regarder the Leftovers et/ou the Affair est sans doute la meilleure occupation de cette rentrée. Mais il faut bien reconnaitre qu’en ces semaines un peu pénibles pour tout le monde, ça fait parfois du bien de se laisser aller à mater des séries un brin plus légères. C’est pour cette raison que j’ai sorti de ma besace une série de Netflix que je m’étais gardée au chaud pour les jours où j’aurais besoin de réconfort. Cette série, c’est Grace and Frankie, produite entre autres par Martha Kauffman, la maman de Friends. Et il faut bien reconnaitre  qu’elle a parfaitement rempli son rôle de sucrerie facile à consommer.



Grace and Frankie raconte l’histoire de deux femmes septuagénaires larguées par leurs maris après que ces derniers leur aient annoncé être gays et avoir l’intention de se marier. Coup de massue pour ces mères de famille retraitées qui doivent se réinventer à un âge où elles n’attendaient plus de grandes surprises de la vie. Cerise sur le gâteau (des mariés), ces sœurs ennemies se retrouvent forcées de vivre ensemble dans la maison secondaire dont elles sont toutes deux copropriétaires.
Avec cette histoire rocambolesque, on pouvait craindre beaucoup de choses de cette série : elle aurait pu être condescendante, déprimante ou caricaturale. Mais il n’en est rien. Il s’agit d’une sitcom sympathique, inoffensive, qui se regarde sans efforts mais qui fait résolument du bien. Une sorte de joyeuse cousine de Transparent en somme, la mélancolie en moins. Ici, rien n’est finalement trop grave ou trop triste. On n’est jamais très inquiets pour ces personnages mais on prend beaucoup de plaisir à les suivre dans cette crise de la septantaine qui vient bouleverser les deux familles. Rarement on aura vu une série traiter avec autant de bienveillance ce nouvel âge ingrat, entre les emmerdes que ces corps vieillissants peuvent causer et la pseudo-sagesse supposément acquise avec l’expérience… ou pas.

Les (ex)femmes bafouées, Grace et Frankie (Jane Fonda et Lily Tomlin, géniales) sont évidemment les héroïnes de cette sitcom. Pleines d’énergie, elles donnent tout son charme à la série. La classe de Fonda et l’espièglerie de Tomlin créent une alchimie jouissive à observer, même si, de prime abord, leurs personnages avaient tout pour se détester : l’une est aussi wasp que l’autre est hippie. Cliché ? Pas tant que ça tant il s’avère que les personnalités de ces deux ladies sont plus subtiles qu’il n’y parait. Les deux actrices osent tout, quitte à donner dans l’autodérision et à frôler les frontières du ridicule. Qu’importe, elles semblent avoir pleinement conscience de l’extraordinaire opportunité de s’être vues offrir des rôles aussi riches, aussi bien écrits et beaucoup trop rares à la télévision.
Les maris fiancés, Robert et Sol (Martin Sheen et Sam Waterston) sont un peu moins bien servis par les scénarios. Je ne saurais dire d’où ça vient mais leur couple parait moins fluide, moins naturel que le duo féminin. Il faut attendre les derniers épisodes de la saison pour enfin être touchés par ces deux gaillards, qui ont l’air, finalement, aussi perdus que leurs ex-compagnes dans ce nouveau schéma familial. Ca n’enlève rien au talent incommensurable des deux comédiens, qu’on ne présente évidemment plus non plus.
A noter que les quatre membres de cet incroyable cast avaient déjà eu récemment l’habitude de travailler ensemble sur des séries, qui plus est sur des séries d’Aaron Sorkin (Sheen et Tomlin dans The West Wing, Fonda et Waterston dans The Newsroom).

Au milieu de ces deux couples qui se séparent, on retrouve des enfants qui assistent à la séparation de leurs parents. Deux filles d’un côté, deux garçons dans l’autre, ils sont les vrais bonus de cette sitcom. Parfaitement interprétés par des comédiens tout aussi géniaux que leur ainés (et y a du niveau), ces personnages plus légers, plus enlevés apportent leurs lots de gentils dramas. L’histoire entre Coyote et Mallory n’est pas tout à fait aboutie et on voudrait en savoir plus sur la mère biologique de Coyote ou sur la vie privée de Bud mais qu’importe. Ils sont là pour ajouter leur savoureux petit grain de sel à ce joyeux bordel. Quatre très bonnes surprises qu’on n’attendait pas dans cette série sur les séniors.


Petit bonbon à regarder sans complexe, Grace and Frankie n’est certes pas la sitcom du siècle mais elle détend, elle fait sourire et elle remplit à merveille son rôle de feel-good série servie par un casting quatre étoiles. Et elle donne à connaitre des personnages qu’on n’a pas l’habitude de voir à la télé, ce qui, en soit, est déjà un superbe exploit. Une vraie bulle de fraicheur pour ceux qui sont en manque de bienveillance.